Empatía

Le terme empathie est né au 20e siècle pour exprimer la capacité de comprendre les sentiments d’autrui comme  de l’intérieur de soi-même ; Il dérive du grec empatheia, même si ce terme signifie au sens propre passion, maladie (en : à l’intérieur ; pathos : sentiment, souffrance.) Le terme grec pour désigner l’empathie était sympathie (« souffrir avec » l’autre), ce qui se traduisit en latin par compassion.

Restons à cela : empathie, comme sympathie et compassion ( celle-ci débarrassée de toute connotation paternaliste) évoque la capacité de comprendre et de s’approprier le «  sentiment » ou » souffrance » (pathos) d’autrui (en, sym, com), de façon à ce que ses sentiments en général (le plaisir profond inclus), et ses souffrances en particulier, ne me soient pas étrangers, mais que je puisse les comprendre à partir de ma propre intériorité, qui plus est, depuis sa propre intériorité.

Si je suis capable d’entrer au fond de moi-même, je suis capable d’entrer au fond de l’autre, d’être empathique, de sympathiser, de compatir. Et,  en même temps, je ne pourrai  être moi-même, mon être profond véritable, libéré de mes masques, projections illusoires et intérêts égoïstes, sauf dans la mesure  où je pratiquerai chaque jour ma proximité, me mettant à la place de l’autre, en me demandant : qu’est ce qui le fait souffrir ?  De quel baume a-t-il besoin pour soigner sa blessure ? C’est en cela que je me fais son prochain.

Toutes les traditions spirituelles, religieuses ou laïques, ont enseigné cette empathie comme  la « règle d’or » de notre réalisation personnelle et de notre façon de voir et de traiter les autres. Dans la tradition juive, deux rabbins d’écoles opposées sont célèbres : Shammai et Hillel, rigoureux le premier et libéral le second. Le Talmud raconte qu’un païen se présenta à Shammai et lui dit : «  je me convertirai si tu es capable de m’enseigner toute la Torah le temps que je puisse rester  debout sur un seul pied. Shammai courroucé l’expulsa. Le païen se présenta à Hillel avec la même proposition et Hillel lui répondit : «  Ne fais pas à ton prochain ce que tu ne veux pas qu’il te fasse. Ceci est toute la Torah, le reste est seulement commentaire». Le païen se convertit.

Il aurait pu se convertir également à l’hindouisme, au bouddhisme, au confucianisme, au taoïsme, au zoroastrisme ou à l’Islam, ou aux enseignements de Pythagore et d’Aristote et de tant d’autres qui enseignèrent la même chose. Evidemment aussi, à la voie de Jésus, qui l’exprima à la forme affirmative : « Traitez les autres comme vous voudriez qu’ils vous traitent, car en cela consiste la Loi et les Prophètes » (Mt 7,12)

Si quelqu’un t’a fait beaucoup de mal, il est normal que tu-moi- se fâche et réclame vengeance ou au moins droit à la rancune. Mais la vengeance et la rancune ne guériront pas ta blessure. Prends ton temps, mais entre  plus profondément en toi, entre  plus profondément en celui  qui t’a fait mal, et tu rencontreras une personne blessée par quelqu’un ou quelque chose. Personne ne fait  le mal par méchanceté, mais  à cause  de manques, d’erreurs ou de dommages. Et regarde sereinement au fond de lui, et prends du recul jusqu’à te mettre à sa place et questionne-toi : «  De quoi aurai-je besoin si j’avais été  lui, elle, si je m’étais trouvé à sa place ? »

Ainsi vont se transformer ton regard et ton attitude en face de lui, elle, jusqu’à ne pas lui faire de mal, ou jusqu’à ne lui vouloir aucune punition ou jusqu’à avoir confiance en lui et lui vouloir du bien. Alors tu lui auras pardonné, bien que jamais  tu ne puisses  l’oublier ni être son ami. Quand tu   auras pardonné, ta blessure  se sera guérie, et tu auras aussi aidé  à guérir  celle de celui qui te blessa.

Tu seras comme le bon samaritain. Tu réaliseras ton « être » divin, compatissant, pour ta guérison et le salut de tous les blessés.

(Publié en VARIOS, Respira tu ser. Meditaciones. Espiritualidad para la vida, Ediciones Feadulta.com, Illescas, Toledo 2021, pp. 81-82)

Traduit de l’Espagnol par Rose-Marie Barandiaran