Prière

Quand je te prie,
je me rapproche de Toi
sans y parvenir.

La prière est présente chez tous les êtres
comme un élan
vers la source.

Tandis que je quémande,
je m’exile de Celui qui est présent dans ce qui m’est donné
et je m’éloigne de Celui qui se donne dans ce que je vis.

Tu sais que tu seras Mer
– tu l’es –
mais ce que tu veux maintenant
c’est pouvoir la contempler comme Autre de toi-même.

La regarder et être regardé par elle
et te laisser prendre lentement par la profondeur de sa vague.

Lorsque, engouffrés dans la mer,
nous serons mer,
nous serons en totalité,
l’ensemble des sens du corps et de l’âme réunis
dans une plénitude-vacuité >
que nos paroles sont impropres à exprimer ici.

Mais à ce stade du parcours
il nous est encore nécessaire de nous identifier
avec un moi aux contours distincts
à partir duquel il devient possible de contempler
le Toi
de la Mer Infinie.

La prière est possible
dans la mesure où
deux
existent.

Lorsque tout sera comblé,
il n’y aura plus de parole,
plus besoin de prière,
car tout sera rempli
de Présentiation.

L’heure n’est pas encore venue.
C’est le moment de goûter au plaisir
que procure la proximité du contact
avant que ne se consume l’union.

(Javier Melloni, Sed de ser)
Traduit de l’espagnol par Peio Ospital