Thich Nhat Hanh – « Je ne suis pas là-dedans »

Thich Nhat Hanh, écrivain et poète vietnamien, moine bouddhiste zen et enseignant de la pleine conscience, est décédé le 22 janvier à l’âge de 95 ans.

C’était un militant pour la paix. Il s’est battu contre la guerre du Viêtnam, où il a été persécuté à la fois par le Nord communiste et par le Sud soutenu par les États-Unis. En 1972, il est devenu un réfugié politique en France, où il a vécu jusqu’en 2014 dans le monastère de Plum Village (Dordogne, sud de la France).

Qu’est-ce que cela signifie de mourir ? Un de ses poèmes en parle

Je ne suis pas là-dedans

Une de mes disciples au Vietnam a l’intention de bâtir un stoupa,
selon la tradition, pour y déposer mes cendres quand je serai mort.
Elle et d’autres personnes voudraient y apposer une plaque avec ces mots :
« Ici repose mon maître bien-aimé ».
J’ai demandé à de disciple de ne pas gaspiller les terres  du temple.
« Ne me mets pas dans une petite boîte que tu renfermeras là-dedans, lui ai-je dit.
Je ne veux pas continuer sous cette forme-là.
Je préférerais qu’on répande mes cendres dehors,
pour aider les arbres à pousser.
J’ai suggéré que, s’ils insistent `pur construire,
ils écrivent plutôt sur la plaque :
« Je ne suis pas là-dedans ».
Mais, au cas où les gens ne comprendraient pas,
ils pourraient ajouter une deuxième plaque :
« Je ne suis pas là-dedans non plus ».
Et si les gens ne comprendraient toujours pas,
ils pourraient écrire sur une troisième et dernière plaque :
« Vous pouvez me trouver dans votre façon de respirer et de marcher ».
Mons corps se désintégrera, mais mes actes me survivront.
Dans ma vie quotidienne,
je pratique toujours de façon à voir ma continuation tout autour de moi..
Nous n’avons pas besoin d’attendre
la dissolution totale de ce corps pour continuer :
nous continuons à chaque instant.
Si vous croyez que je ne suis que ce corps,
alors vous ne m’avez pas vraiment vu.
Quand vous regardez mes amis, vous voyez ma continuation.,
Quand vous voyez quelqu’un en train de marcher
en pleine conscience et avec compassion,
vous savez qu’il est ma continuation.
Je ne vois pas pourquoi nous  devons dire « je vais mourir »,
parce que je peux déjà me voir en vous,
en d’autres personnes et dans les générations futures.
Même quand le nuage n’est plus là,
il continue sous forme de neige ou de pluie.
Un nuage ne peut pas mourir.
Il peut se transforme en pluie ou en grêle,
mais il ne peut pas devenir « rien ».
Le nuage n’a pas besoin d’avoir une âme pour continuer.
Il n’y a ni commencement ni fin.
Je ne mourrais jamais.
Ce corps se dissoudra,
mais je ne mourrai pas pour autant.
Je continue pour toujours.

(Thich Nhat Hanh, La terre es ma demeure)